Par Blanche de Labarre

Ingénieure patrimoniale

BRED Banque Privée

Mesure emblématique de la Loi de finances pour 2025, la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR)(1) vise à instaurer un taux minimum d’imposition de 20% (hors prélèvements sociaux) pour les contribuables disposant d’un revenu fiscal de référence supérieur à 250 000 € pour une personne et 500 000 € pour un couple soumis à imposition commune. Cette nouvelle CDHR s’applique uniquement pour les revenus perçus en 2025(2).

Schématiquement, si la somme de l’impôt sur le revenu (barème progressif et PFU de 12,8% sur les revenus financiers) et de la contribution sur les hauts revenus (CEHR de 3% ou 4 %) est inférieure à 20% du revenu fiscal de référence, la CDHR s’applique.

En pratique, cette nouvelle CDHR a vocation à toucher les contribuables dont la plupart des revenus est assujetties à la flat-tax (comme un chef d’entreprise se rémunérant très essentiellement par des distributions de dividendes). Pour ceux-là, le taux marginal d’imposition pour 2025 serait de 37,2%(3) , en incluant les prélèvements sociaux (versus 34% en 2024 avec 30% de flat-tax et 4% de CEHR).

Concrètement, la CDHR est égale à : 

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Plusieurs précisions doivent être apportées, démontrant la complexité d’application et les incertitudes d’une taxe supplémentaire destinée a priori à être ultra-temporaire :

Le revenu fiscal de référence (RFR) sur lequel est assis la CDHR fait l’objet d’une définition spécifique (« RFR ajusté ») et donc de plusieurs retraitements par rapport au RFR servant de base à la CEHR . Notons notamment les retraitements ci-dessous .

Les revenus soumis à prélèvement libératoire réalisés avant le 15 février 2025  sont neutralisés. 

Les revenus exceptionnels sont en pris en compte pour le quart de leur montant. Répondent à la définition de revenus exceptionnels ceux qui ne sont pas susceptibles d’être recueillis annuellement et dont le montant dépasse la moyenne des revenus des trois années précédentes. Cette mesure permettrait donc d’atténuer l’effet de la CDHR pour le chef d’entreprise réalisant une importante plus-value lors de la vente de son outil de travail en 2025. 

D’autres revenus sont exclus entièrement du RFR ajusté à l’image par exemple de l’abattement fixe de 500 000 € sur les gains de cessions de titres par les dirigeants partant à la retraite, permettant ainsi de ne pas neutraliser cet avantage majeur pour le chef d’entreprise cédant.

Le montant de l’impôt sur le revenu à prendre en compte est également retraité afin de tenir compte de l’avantage en impôt résultant de certaines réductions et crédits d’impôt. Ainsi, en cas d’application de la CDHR, certains mécanismes risquent de se trouver inefficaces (par exemple versement sur un PER, crédit d’emploi pour employés à domicile). A contrario, d’autres réductions d’impôt ne seraient pas neutralisées (par exemple souscription de parts de FIP/FCP, opération « Girardin »). Les contribuables concernés sont donc amenés à faire preuve de prudence afin de ne pas engager de dépenses « inutiles fiscalement » et devront s’appuyer sur leur conseil pour déterminer sur quelles opérations de défiscalisation s’engager cette année.

Notons également que, pour les contribuables évoluant dans un contexte international et percevant des revenus de source étrangère, les crédits d’impôt applicables en France en application des conventions fiscales internationales viennent s’ajouter au montant de l’impôt pris en compte et sont donc bien retenus. 

Un mécanisme de lissage a été mis en place pour les contribuables se situant juste au-dessus du seuil d’application (RFR ajusté inférieur à 330 000 € pour une personne seule et de 660 000 € pour un couple). Ce mécanisme, dont nous ne préciserons pas les modalités de calcul dans cet article, a vocation à atténuer l’effet de seuil induit par l’application de la CDHR.

Un dernier élément majeur est celui des modalités de paiement de ce nouvel impôt. En effet, la CDHR devra faire l’objet d’un versement d’un acompte entre le 1er et le 15 décembre 2025(7), égal à 95% du montant de la contribution estimée par le contribuable . 

Concrètement, les contribuables estimant entrer dans le champ d’application de cette taxe devront calculer eux-mêmes le montant de celle-ci en s’appuyant sur les revenus réels perçus entre le 1er janvier et le 30 novembre 2025 et une estimation des revenus perçus au mois de décembre. 

La responsabilité du paiement de l’acompte reposera sur le contribuable, qui pourra le cas échéant être soumis à une sanction pécuniaire. Une pénalité prenant la forme d’une majoration de 20% sera susceptible de s’appliquer en cas de défaut, de retard de paiement ou de sous-estimation du montant.

Ainsi, les contribuables concernés auront tout intérêt à maîtriser les rouages de la CDHR et ses complexités liées afin de mettre en place les arbitrages qui s’imposeraient, le cas échéant. 

(1) Nouvel article 224 du Code Général des impôts . (2) Elle était initialement prévue pour s’appliquer 3 ans. (3) 20% CDHR +17,2% prélèvements sociaux, hors retraitements éventuels ci-dessous. (4) Article 1417-IV-1° du Code général des impôts. (5) Liste non exhaustive. (6) Date d’entrée en vigueur de la loi. (76) Le solde de la taxe sera prélevé par voie de rôle au cours du dernier trimestre 2026 après l’émission de l’avis d’imposition relatif à l’impôt sur les revenus 2025 déclarés au printemps 2026. En cas d’excédent, le solde sera restitué.

Crédits photos : Camille Boutoux, Getty Images