Rédigé par Sébastien Coiffard, ingénieur patrimonial BRED Banque Privée en novembre 2023.
En l’absence du dirigeant, sa société est souvent pour ses héritiers l’actif le plus complexe à gérer. Des blocages ou lenteurs peuvent alors être fatals à la survie de l’entreprise. Pour éviter une issue défavorable, le dirigeant dispose d’outils juridiques lui permettant d’organiser une continuité.

Désigner son successeur dans les statuts
Il est possible de désigner dans les statuts la personne qui occupera la fonction de direction à la suite du décès ou de l’incapacité du premier dirigeant. Cette personne disposera alors de pouvoirs prédéfinis et agira dans l’intérêt de la société, indépendamment de l’intérêt des héritiers.
En cas d’incapacité, réaliser un mandat de protection future
Le mandat de protection future est un acte sous seing privé, parfois notarié, qui permet au dirigeant de désigner à l’avance un mandataire chargé de gérer ses intérêts en cas d’incapacité. Il prend effet après la constatation médicale de l’incapacité physique ou mentale du mandant. Le mandataire est tenu de veiller au patrimoine et/ou à la personne du mandant : en matière de protection patrimoniale, il ne pourra pas disposer des biens et ses prérogatives sont limitées aux actes conservatoires et d’administration s’il s’agit d’un acte rédigé sous seing privé.
Le mandat prend automatiquement fin :
- lorsque le mandant se rétablit,
- s’il est placé sous curatelle ou tutelle,
- ou s’il décède.
En cas de décès, réaliser un mandat à effet posthume
Le mandat à effet posthume est un acte notarié qui permet de désigner de son vivant un mandataire chargé de gérer tout ou partie de son patrimoine dans l’intérêt de ses héritiers. Pour être valable, le mandat doit être justifié par un intérêt sérieux et légitime au regard de la personne de l’héritier (s’il est mineur par exemple) ou du patrimoine successoral (s’il existe des titres de société entre autres). Sa durée est de 2 ans, portée à 5 ans en présence d’actifs professionnels notamment, prorogeable.
Le mandataire n’ayant pas vocation à remplacer le dirigeant, ses prérogatives demeurent limitées à l’exercice des droits de vote en assemblée générale ordinaire. Sauf cas particulier, il est ainsi exclu des assemblées générales extraordinaires, ne peut pas disposer des actifs, ni vendre ni apporter les titres sociaux, ni s’opposer à ce qu’un héritier le fasse.
Le mandat peut éventuellement prendre fin de manière anticipée par révocation du juge à la demande d’un héritier ou de son représentant.
Sécuriser la gestion ou la cession de son entreprise grâce à la fiducie-gestion

La fiducie est un contrat au terme duquel le constituant transfère des biens, des droits ou des sûretés, présents ou futurs, à un fiduciaire qui, les tenant séparés de son patrimoine propre, agit dans un but déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires.
Cet outil est particulièrement adapté pour le dirigeant qui, en cas d’incapacité ou de décès, souhaite assurer le bon fonctionnement de sa société afin d’organiser la gestion ou la cession dans des conditions optimales.
Le fiduciaire est un avocat ou un organisme financier (banque, compagnie d’assurance). Il dispose pour accomplir sa mission de pouvoirs étendus, dont la capacité de céder les titres de la société, ainsi que la gestion des capitaux issus de cette cession.
Pour qu’elle soit opérante à la fois en cas d’incapacité et de décès, il est préférable de recourir à une fiducie sur plusieurs niveaux :
Une mise en place par le dirigeant lui-même sur les titres qu’il détient directement, prenant effet de manière différée au jour de l’incapacité médicalement constatée. La gestion de l’entreprise confiée au fiduciaire échappera ainsi aux mesures de protection des majeurs, souvent inadaptées.
Une mise en place par une société holding interposée sur les titres de la filiale, prenant effet de manière différée au jour du décès du dirigeant. La gestion de l’entreprise confiée au fiduciaire échappera aux règles de l’indivision successorale ou du mandat à effet posthume.
POUR L’ADMINISTRATION FISCALE, LE BIEN OBJET DE LA FIDUCIE RESTE DANS LE PATRIMOINE DU CONSTITUANT REDEVABLE DE L’ENSEMBLE DES IMPÔTS ET TAXES.
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